Légèrement Heureux

Alice Isaac

Alice incarne un retour à l’essentiel, une vie réinventée autour de la sobriété qui nous inspire à voir grand dans la simplicité !

Alice Isaac

Où vis-tu et à quoi ressemble ton chez-toi ?

J’habite à Annecy dans une tiny house, une petite maison en bois écologique que j’ai fait construire il y a trois ans et demi.

J’avais déjà modifié pas mal de mes habitudes dans mon quotidien pour aller vers plus de sobriété, la manière dont je voyageais par exemple ou mon alimentation. Il me restait donc la question du logement à aborder. La tiny house a été le coup d’accélérateur vers cette vie plus minimaliste. Quand tu vis dans 14 mètres carrés (+ 7 de mezzanine), tu ne peux pas avoir trop d’affaires. Je me rends compte à quel point ça m’a libérée en termes de charge mentale. Tout le temps que je ne passe pas à entretenir la maison ou à acheter des trucs, les réparer, les renvoyer, c’est du temps que je passe à faire d’autres choses qui m’épanouissent.

La tiny house est aussi une manière de devenir propriétaire sans s’endetter sur 25 ans.

Et avant ça, où est-ce que tu vivais ?

À la frontière suisse, dans un appartement classique de 50 m² avec  un balcon. Plus on a de place, plus on stocke du bazar ! Dans ma tiny house, tout est optimisé. J’ai finalement plus de rangements que dans mon ancien appart. J’ai diminué ma garde-robe, mais pas tant que ça, et j’ai réduit tout ce qui est petit électroménager non nécessaire (bouilloire, gaufrier, etc.).

Quel est ton métier et penses-tu qu'il a un impact positif sur le monde ?

Avant je travaillais en Suisse, pour une grande entreprise qui vend des coffrets cadeaux. C’était une bonne expérience pendant 5 ans, mais je travaillais trop. C’était une fuite en avant perpétuelle. L’argent que j’avais, je le dépensais pour décompresser. Je me suis dit que ce n’était pas possible. Je ne voulais pas me réveiller dans 10 ans en me demandant ce que j’avais foutu de ces dernières années.

J’ai commencé une reconversion pour sortir de cette logique. Je suis passée à 4 jours par semaine pour retrouver du temps pour moi. À ce moment-là j’ai vu passer une annonce de l’éco-aventurier Benjamin de Molliens , avec lequel je travaille maintenant. Il recherchait quelqu’un pour l’aider à faire de la communication, pour ses conférences principalement. J’ai démarré en tant que bénévole un jour par semaine, puis rapidement en freelance. Il m’a confié peu à peu d’autres missions, j’ai par exemple bien développé la page LinkedIn d’Objective Zéro.

Aujourd’hui, je suis associée avec Benjamin dans cette agence de sensibilisation des collaborateurs d’entreprise aux enjeux de la transition écologique, et plus particulièrement sur le volet sobriété. Notre objectif est de montrer tout ce que la sobriété va nous faire gagner, de faire comprendre que la transition écologique n’est pas du tout une punition et qu’elle peut au contraire être hyper excitante, hyper désirable.

C'est ton ressenti à toi aussi ?

Oui et c’est aussi celui de mes amis qui m’ont vue évoluer. Depuis 3 ans, ile me disent que je suis une nouvelle personne, qu’ils ne m’ont jamais vue aussi heureuse. Alors que je travaille plus qu’avant et que je gagne moins d’argent ! Mais je n’ai pas du tout l’impression de travailler, car ce que je fais est ma passion et que ça a du sens.

Quel était le programme de tes dernières vacances ?

Je suis partie en Interrail jusqu’à Istanbul ! J’ai fait 3 Interrails ces 3 dernières années : un en Scandinavie, de la Norvège jusqu’à l’Estonie, un autre où j’ai traversé toute l’Italie et donc celui-ci, jusqu’à Istanbul. Je suis passée par la Sicile pour voir ma famille, par la Grèce, la Bulgarie et la Turquie, puis en remontant par l’Allemagne  et la Belgique.

Le train a révolutionné ma manière de voyager. Avant, le sentiment d’être en vacances commençait quand j’étais arrivée à destination. Désormais c’est dès que je pars de chez moi. Tout l’itinéraire, c’est aussi le voyage, ça étire le temps des vacances. Je trouve aussi que le fait de se rendre compte de la distance parcourue te connecte beaucoup plus aux territoires que tu découvres.

En termes de convivialité, de lien social, le train, c’est génial. J’adore les trains de nuit avec des couchettes à 4, ça me donne l’impression d’être en colonie de vacances. Voyager seule me permet de sortir de ma zone de confort et de faire un tas de rencontres. C’est important, en tant que femme, de reprendre le pouvoir sur toutes les peurs qu’on te met dans la tête. Concrètement, dans la plupart des cas, tout se passe bien. Il ne faut bien sûr pas prendre de risques inutiles, mais globalement le monde n’est pas si hostile qu’on le pense.

Tu as arrêté de prendre l'avion ?

La dernière fois que je l’ai pris, c’était il y a 3 ans pour aller en Sicile. C’était avant que je sache qu’il existe un train de nuit qui monte sur le ferry pour rejoindre la Sicile.

Je me laisse l’option de reprendre l’avion sur une longue distance, mais en restant plus longtemps sur place. Là il y a deux occasions où je « risque » de le prendre. La première c’est pour aller à la COP 29 en Azerbaïdjan. Je voulais y aller en train, mais la frontière terrestre entre la Turquie et l’Azerbaïdjan est fermée. Ensuite ce serait pour la COP 30 au Brésil. J’aimerais bien y aller en voilier, au moins pour l’aller.

Il y aura forcément des personnes qui vont me tacler, en me disant que je vais faire des ateliers sur le climat et que je reviens en avion. Maintenant je suis assez à l’aise avec ça. C’est comme les gens qui critiquent Cyril Dion parce qu’il a fait le film Demain et qu’il a fait le tour du monde pour aller interviewer des gens. En fait, ce film a eu un tel écho, ça a été un tel détonateur pour plein de monde, qu’on ne peut pas s’arrêter à l’empreinte carbone du film.

Comment fêtes-tu Noël ?

Cette année, c’est la première fois que j’ai dit à ma famille que je ne serais peut-être pas là à Noël. Je n’aime pas trop cette période qui sonne comme un bilan fin d’année, ça me rend un peu nostalgique.

Plus je suis engagée, plus certaines personnes de mon entourage vont venir me titiller sur des sujets, par exemple autour du végétarisme. C’est pénible à gérer. Je ne sais pas si c’est le cap de la trentaine, mais je commence à lâcher prise sur ces problématiques. J’arrête de plus en plus de faire des choses pour faire plaisir ou pour contenter tout le monde. Il faut faire ce qui nous fait du bien dans la vie.

Quel genre de cadeaux aimes-tu offrir ?

Des moments de vie plus que des choses matérielles, sauf si je sais que la personne en a besoin et qu’elle a prévu de se l’acheter de toute façon. J’aime offrir des spectacles, des cours de cuisine, des billets de train… Offrir des souvenirs, je trouve que ça a du sens. En plus il y a une double surprise : le moment où tu offres le cadeau et celui où la personne va le vivre et donc penser à toi.

Et toi, quel est le dernier cadeau que tu t'es fait à toi-même ?

Tout mon budget passe dans les voyages. Je m’achète un pass Interrail dès qu’une promo sort, ensuite j’ai 11 mois pour l’utiliser. 

J’adore aussi les courses Mad Jacques. J’ai fait celle en stop, celle en canoë. L’année prochaine j’ai envie de faire celle en paddle et celle en trek. C’est vraiment une colo pour les grands, qui en plus a de super valeurs de convivialité, d’écologie et de vivre ensemble.

Est-ce qu'il y a un aspect de ta transition écologique qui t'a coûté ?

Oui, l’aspect relationnel. Plus je me suis engagée, plus j’ai été affirmée dans mes propos et mes actions. Ça génère de l’incompréhension voire du rejet, parce que les gens ne te reconnaissent plus et n’arrivent plus à connecter à toi. La sanction sociale est hyper forte pour les gens qui s’engagent. Je comprends pourquoi on est si peu nombreux.

As-tu un film/livre ou podcast en rapport avec l'écologie à conseiller ?

Je vais opter pour mon film préféré, Captain Fantastic. Je ne sais pas combien de fois je l’ai vu, ce film me bouleverse. On y retrouve l’aspect vie à contre-courant du modèle de société classique.

Côté podcast, j’aime bien Nouvel Oeil de Victoria Guillomon Basilic Podcast de Jeanne Clesse. J’ai d’ailleurs fait avec elle un épisode sur les avantages et les inconvénients de la tiny house.

Sur la partie féminisme, j’aimais beaucoup La Poudre de Lauren Bastide et Le Cœur sur la Table de Victoire Tuaillon, incontournable. 

D’ailleurs, je suis également animatrice de La fresque du sexisme, un jeu d’intelligence collective pour détricoter la mécanique sexiste et construire une société plus égalitaire. C’est un super outil pour créer des discussions et faire émerger des solutions sur ce sujet trop souvent clivant. Il y a tellement de dimension à aborder autour de cet enjeu, pour que la culture d’entreprise devienne plus inclusive et safe pour toutes et tous.

Bilan environnemental pour la vie d’Alice : 5 tonnes de CO2/an.
Alors, ça ne donne pas envie ?
 

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